Lorsque Barbara devient Balibar !

Lorsque Barbara devient Balibar !

Il ne faudrait pas se méprendre sur le film « Barbara » de Mathieu Amalric avec Jeanne Balibar. Il ne s’agit en aucun cas d’un film où Jeanne Balibar deviendrait par la magie du cinéma ou d’une Biopic la chanteuse Barbara. C’est tout le contraire nous sommes dans un cinéma d’auteur de très haut niveau où le réalisateur fou amoureux de son actrice invente une Barbara qui devient Balibar.

Une Balibar au sommet de son charisme, de son talent, de son inventivité, de sa forme, de sa gestuelle qui imite, certes, Barbara au départ mais finit par la supplanter, à chanter mieux qu’elle, à être plus vivante et plus attractive et séduisante que Barbara, elle-même.

Un mauvais réalisateur aurait fait comme la grande tendance du moment, il aurait fait un film biographique sans âme où une actrice tenterait tant bien que mal avec une bonne lumière, un bon stylisme et de bons effets spéciaux à être Barbara. Un grand réalisateur sort de ce piège convenu et invente SA Barbara. Et Amalric trouve Balibar et la laisse s’épanouir merveilleusement, de manière époustouflante un vrai personnage de fiction inspiré d’une chanteuse réelle.

Et là on touche le chef d’oeuvre, dans cette manière qu’à le réalisateur de fabriquer un vrai film de cinéma dans la lignée d’un Orson Welles, d’un Bergman ou d’un Fritz Lang où l’on voit les coulisses, où les coulisses sont même l’endroit même privilégié de la mise en scène, comme ces moments fabuleux de faux off où Balibar chante avec Aurore Clément sur un canapé ou joue un solo sur un piano en transit dans le hall de studios de cinéma.
Dans les duels entre les images d’archives de la vraie Balibar et de la vraie Barbara, Balibar mange Barbara, elle prend mieux l’espace et la lumière, elle est plus physique et donne plus de variations dans l’interprétation des chansons. C’est inouï mais Balibar réinvente Barbara mieux que l’original. Le personnage de fiction est plus fort que celui du réel.

Amalric est le metteur en scène bienveillant qui offre toutes les libertés à l’épanouissement de son actrice, il plante le décor, lui donne le contexte, les moyens et lorsqu’il la filme en fuite du tournage lorsqu’elle part en camionnette avec un jeune technicien c’est tout aussi réussi.

Ce duo Amalric/Balibar eclipse Barbara mais c’est pour la bonne cause, pour faire un grand film de cinéma qui deviendra vite une référence mais qui donne aussi furieusement envie de retrouver un peu de quiétude chez la vraie Barbara après le feu d’artifice de Balibar.

Almaric retombe, à chaque plan, en amour en filmant Balibar et nous aussi. Nous ne sommes pas là dans un film musical, une comédien musicale ou une biopic mais dans du film d’auteur comme le cinéma français fait de mieux.

Il faut aller voir Barbara pour recevoir une magnifique leçon de cinéma et assister au show sublime d’une actrice d’exception. Il faut oublier que Amalric n’est qu’un acteur, il fait partie de nos tout meilleurs réalisateurs.

Barbara, de Mathieu Amalric avec Jeanne Balibar et Mathieu Amalric, Gaumont.