Un Bô regard sur le monde

Un Bô regard sur le monde

BO GAULTIER DE KERMOAL exposait pendant un seul jour, le Lundi 15 mai 2006, dans un lieu éphémère, une trentaine de ses tableaux, s’appropriant ainsi des bureaux fonctionnels de la rue d’Anjou à Paris, quelques heures avant leur occupation professionnelle.

Le concept est original, et cohérent avec la démarche
de Louis Marie, surnommé Bô par ses amis car cela veut
dire "ami" en Asie.
A la fois comédien et peintre, il travaille la nuit à
l’acrylique.
Bô a plusieurs visages, plusieurs vies en une, il se
bat, se débat avec d’étranges fantômes...des dualités
obsédantes et inquiétantes, douces et lumineuses.

Nous avons eu la chance que Bô lui-même nous présente
ses tableaux au cours d’une exposition éphèmère dans
des bureaux transformés en galerie. L’interrogeant sur
la récurrence du travail sur le masque « envisagé »
dans son travail pictural, celui-ci me raconte qu’il
n’a jamais connu les traits physiques de ses géniteurs
dont il sait simplement qu’ils étaient asiatiques et
cherokee.

Ses tableaux apparaissent comme une expression d’un
procédé mental pour imaginer les figures qui l’ont
construit.

Son travail depuis 1989 l’a beaucoup aidé à faire
cette recherche identitaire sur lui-même, à mieux se
connaître, à mieux comprendre sa propre violence et à
la canaliser d’une manière saisissante. Bô parle avec
passion et sincérité de ses projections picturales, il
n’est avare d’aucun sentiment, son oil est généreux.
Le fil rouge qui nous montre le chemin à suivre dans
quasiment toutes ses toiles, nous donne des clefs pour
entrer dans son ouvre et permet de prolonger un
tableau au delà du cadre. On mêle alors notre propre
histoire à la sienne. On se sent libre de pénétrer
dans son monde qui, même s’il est parfois sombre,
n’est jamais désespéré puisqu’il y a toujours de la
magie, de la divinité voir un archange en filigrane

Ses ouvres de petits et grands format, ses dyptiques,
tryptiques sont pour la plupart des visages simples,
doubles ou triples dans un sur-cadrage que lui-même a
institué au milieu de la toile ; il y a aussi, presque
à chaque fois, une ligne horizontale qui témoigne du
temps, de la chronologie, la ligne de fuite qu’il
tente de perpétuellement apprivoiser.

Sa peinture très américaine dans sa construction, sa
composition et ses thématiques témoignent d’une sorte
d’universalité du métissage, Bô est dans une phase
d’introspection qui lui fait aller aux méandres de sa
propre histoire, à l’essence de sa génétique intime.

Ses tableaux sont les écrans de ses douleurs, ils
suivent ses émotions les plus fortes. Bô s’expose avec
un partage total, quitte à se mettre à nu dans ses
peintures, exhibant son esprit, ses doutes, ses
errances, mais aussi sa poésie très imaginative et
sensible aux contemplateurs.

Le 11 septembre, les émeutes en banlieues, les lieux
les plus urbains sont des moteurs de création pour Bô
qui a besoin de faire de son travail un engagement
"politique" dans le sens premier du terme.

Bô se sent impliqué dans ce monde, dépassant souvent
sa propre recherche ethnique pour aller puiser, dans
les drames collectifs ou les visions d’ailleurs,qui
deviennent les décors de son expression personnelle
multiple.

Il y a un côté faussement naïf dans le Bô regard de ce
jeune homme de presque quarante ans qui en fait dix de
moins ; son travail mérite d’être encouragé car il est
n’est pas démagogue ou empreint d’expression
bourgeoise d’un comédien qui voudrait un peu se mettre
en danger en étoffant sa palette de création.

Il y a une nécessité vitale chez Bô qui lui donne une
urgence à témoigner sur lui-même et le monde auquel il
appartient.Avec un travail en totalité parfois encore
inégal, il y a dans cette production-là des tableaux
qui forcent le respect, qu’on voit et revoit, qu’on
aimerait posséder, des petits bijoux historiques et
cruels, modernes et séculaires.

BO GAULTIER DE KERMOAL, un artiste à suivre, à voir grandir et s’épanouir.


Le site de Bô Gaultier de Kermoal


Le site de Bô Gaultier de Kermoal