« Laisse-moi partir en paix » par Vincent Lambert

« Laisse-moi partir en paix » par Vincent Lambert

Ma Petite Maman Chérie, c’est du fond de la prison de mon corps que je t’adresse cette demande d’amour qui consiste à ouvrir enfin ma geôle, afin que je puisse m’envoler paisiblement vers des cieux plus cléments.

Ma peine terrestre me semble interminable. Alors je te le demande, Maman, ne sois pas la complice active de mon enfermement et de ma condamnation à la peine de vie.

Cette vie qu’on me prolonge, à cause de toi et de ton amour qui m’étouffe, n’est pas la vie qu’un humain a envie de choisir. Oui, Maman, moi je voulais vivre mais pas de cette façon. Je voulais marcher au bord d’une plage ou à travers bois, en respirant l’air frais à pleins poumons. Je voulais rire, chanter, danser, manger, aimer ma femme et venir m’attabler avec elle autour de ta belle et bonne table.

J’ai l’impression d’être l’enfant turbulent qu’on vient de punir, en l’obligeant à rester au coin sans bouger.

Il me semblait, à travers notre foi chrétienne, qu’on ne pouvait se satisfaire de la souffrance de l’autre et qu’il fallait, bien au contraire, tout mettre en œuvre afin de lui rendre la vie plus douce. Si notre Église n’est pas capable de mettre ses dogmes en application, alors elle n’est plus mon Église.

Même notre Seigneur n’est pas resté en croix aussi longtemps que je suis cloué dans ce lit à cause de ton acharnement, égoïste et surprenant, qui consiste à me maintenir dans cet état lamentable que je ne souhaite pas à mon pire ennemi.

Je sais, Maman Chérie, que tu m’aimes de tout ton cœur de mère, alors ne permets pas que je sois ton jouet et celui des médias. Ne fais pas passer tes intérêts personnels avant les miens, en pleurant devant les Tribunaux. Le seul acte qui soit un crime est celui de me laisser branché. Jusqu’à quand va-t-on jouer avec moi comme on le fait avec une marionnette. Il est grand temps de couper les ficelles, sachant que je n’appartiens à personne... Pas même à toi, Maman que j’aime !

Que ton amour inconditionnel à mon égard, Maman, puisse enfin éclairer le chemin de ta raison et la voie de ma délivrance. Que la paix puisse enfin être avec moi.

La seule logique à notre existence terrestre est l’amour, alors je souhaite que tu m’aimes encore plus fort, Maman, en ouvrant la cage à l’oiseau libre que j’ai envie d’être.

Puisses-tu tout mettre en œuvre pour organiser mon évasion !