Roger Gaillard bourlingueur et encyclopédie vivante du petit monde de l’édition tient toujours la route. Même que, les éditeurs à compte d’auteur abusif voudraient le voir passer de vie à trépas. Tel Siegfried, il a tiré son épée contre les margoulins de l’édition qui s’en prenaient à des proies faciles au nombril souvent très développé. Au nom de valeurs liées à l’indépendance, la transparence et l’éthique éditoriale, il caracole à lui tout seul à la tête des éditons L’Oie Plate en tant qu’auteur et éditeur d’Audace.
Cet infatigable honnête homme a été président de l’association Calcre (Comité des auteurs en lutte contre le racket de l’édition) : http://www.calcre.com/ association d’information et de défense des auteurs, qui s’activa du manche entre 1979 et 2004, 25 ans durant ! Elle coula torpillée après une sombre affaire avec un collaborateur qui pétait son salaire plus haut que son cul et se saisit de la Cour pour obtenir l’obole de 45 000 euros. S’en suivit, solidarité oblige, la création de Cose-Calcre en tant que Comité de soutien pour le droit à l’expression du Calcre. A croire, selon ma propre hypothèse, que cet ignoble torpilleur du Calcre fut mandaté par des éditeurs qui voulaient afficher le Calcre sur son tableau de chasse !
Pour vous donner une idée « des dix commandements de l’auteur » versions Cose-Calcre : http://www.cosecalcre.com/accueil.htm
Mais le Calcre, ce n’était pas seulement une association militante. Une revue unique en son genre et sans publicité donc libre de ses propos, Ecrire et Editer : http://www.cosecalcre.com/2nd%20site/La-revue_Ecrire-et-Editer.html la bien nommée fut publiée pour ses bons soins aux auteurs. Durant 49 numéros, on y retrouva tous les conseils immédiatement utilisables et l’avis circonstancié sur tous les sujets touchant à l’édition par des personnes compétentes du métier. Pour vous donner un aperçu de certains titres de ses dossiers, au hasard Balthazar : « Le roman sentimental » / « L’édition jeunesse » / « Polar » / « Comment écrire mieux » / « La face cachée de l’édition »…. Une bonne vingtaine de collaborateurs (si mes chiffres sont exacts), militant(e)s du grand partage de l’information sévirent à bon escient dans cette revue formidable, sans compter les fameux illustrateurs. Déjà Audace et d’autres guides pratiques étaient édités par Le Calcre.
En janvier 2005, Roger Gaillard, toujours avec son empathie légendaire qui le caractérise, créa les éditions L’Oie Plate à l’intention comme toujours des auteur(e)s très exigeant(e)s. Ses propos sans ambiguïté comme un manifeste sonnaient juste : « A l’instar de l’association mère, L’Oie plate ne conçoit son existence que dans l’indépendance de tout groupe de pression, la critique libre et sans compromission ! ».
Trois poids, trois mesures pèsent chez L’Oie Plate à prendre son envol. De l’avion-cargo au planeur.
« Poids Lourd : des bibles de références issues des enquêtes de terrain tels qu’Audace, Arlit (Annuaire des revues littéraires) ou Safêlivre (Guide des salons et fêtes du livre), au format A 4, pèsent entre 750 grammes et 1500 grammes ».
« Poids Moyen : des guides pratiques alliant l’information et le conseil tels que La Revue, Mode d’emploi et 150 questions sur l’édition. Ces guides pèsent entre 250 et 500 grammes et ont des formats poches approchant du A 5 ».
« Poids Plume : de mini livres pratiques (format mini poche) sur un sujet particulier ou des pamphlets sur le milieu. Les Comités de lecture, un ouvrage publié du temps du Calcre, constitue le prototype de cette collection de petits formats à venir ».
Que des ouvrages pratiques de référence qui concilient tous les domaines de l’édition et du droit d’auteur. Ils s’adressent en premier lieu aux nouveaux auteur(e)s ou comme les qualifie avec sa verve habituelle Roger : « les inconnus débutants », mais également à tous les auteur(e)s dans tous les genres, de la littérature en passant par les sciences sociales et la BD… ayant ou non de la bouteille.
Pour en venir à Audace , vaste pavé de 1440 grammes et 624 pages dont au moins 16 au tout début sont consacrées à vous mettre dans le bain si vous n’y connaissez rien ou vous rafraîchir les idées sur le monde de l’édition en mutation. Son aperçu fait le tour du pré carré des petites aux grandes maisons en béton ou en paille. Il concerne leur mode de fonctionnement, leurs contrats, les genres littéraires et leurs implications économiques, ainsi que le rôle des conseillers littéraires… Ses recommandations pratiques pour présenter, envoyer, protéger son manuscrit, ainsi que les stratégies de démarchage et l’avertissement que peuvent donner les éditeurs. Tout y est touffu et riche en informations jubilatoires. Roger Gaillard s’adresse à des auteur(e)s exigeant(e)s, je le rappelle et il les respecte. Des mois de boulot à rédiger son Guide qui en est déjà à sa huitième édition, avec la remise à niveau de ses fiches pour chaque éditeur, d’un numéro sur l’autre, ainsi que l’apparition et l’extinction de maisons d’éditions. Travail à plein temps pour un militant du champ éditorial. Pas de quoi jouer les bacchanales où les filles de l’air. Quand il accouche de son Guide, Roger est exténué, pour sûr !
Vous avez ensuite bien plus de 500 pages qui se consacrent aux 1120 fiches d’Audace pour chaque éditeur, avec au préalable le décodage des fiches présentées dans un tableau très lisible et très clair. Vous saurez s’il faut envoyer votre bébé par la poste ou par courriel, si l’éditeur qui vous intéresse édite à compte d’auteur ou compte d’éditeur, à combien il tire et j’en passe des meilleurs.
Et en plus, pour rajouter du labeur au perfectionniste rigoureux, Roger administre des étoiles et des tomates qui tiennent compte de ses sources au près des auteur(e)s, et des retours auprès des guides précédents. Trois étoiles, c’est Byzance ou le profil type de l’éditeur très conseillé, jusqu’au ciel bas avec l’éditeur conseillé sous certaines réserves. Les tomates se ramassent à la pelle et pas qu’en automne mais plutôt en été, du moins, c’est la saison recommandée. Sauf pour Roger qui les balance toute l’année, lui, pour mettre en garde contre les arnaques des contrats fomentés par des éditeurs rapaces qui cassent et entubent les auteur(e)s. Vous comprenez maintenant qu’au même titre que les célèbres guides culinaires, les éditeurs s’arrachent les cheveux et ne dorment plus la nuit jusqu’à la sortie d’Audace. Ouvrage de référence professionnelle qui leur consacrera ou non la véracité de leur part d’honnêteté intellectuelle et économique, suivant leur classement étoilé ou rouge tomate. On n’achète pas Roger. Il a la verve et le sens inné de l’indépendance au service des auteur(e)s. De plus, sa connaissance du milieu bonifie avec le temps comme le bon vin. C’est pour vous dire s’il est fort du bouchon. D’ailleurs : « Plusieurs dizaines d’auteurs lui doivent d’avoir pu étriller en justice leurs prestataires indélicats ». Ce n’est pas moi que le clame, c’est lui.
Quant aux éditeurs non-classés, ils proviennent du fait que les maisons d’éditions n’ont pas répondu au formulaire de Roger ou y ont répondu de façon trop dilettante. On ne le fait pas à Roger !
Et comme si ce Guide pouvait recevoir une quelconque critique, Roger y a adjoint en fin de pavé un index général par genres et par thèmes. De fait, plus jamais il ne devrait y avoir gourance pour le jeunot boutonneux qui veut envoyer son recueil de poésie. Impossible pour lui de se tromper, à moins qu’il soit miro. C’est clair comme de l’eau de roche ! En effet trop souvent les éditeurs se plaignent de recevoir des manuscrits qui n’ont rien à voir avec leur politique éditoriale. C’est pourquoi la cible est le premier acte du futur hypothétique édité actif. Avec Audace, plus de doute possible. Après, il suffit de se plonger dans les catalogues des éditeurs et lire au moins un ou deux de leurs ouvrages et le tour est joué ! Bien souvent au final, en toile de fond c’est bonjour tristesse et l’attente au bord de la crise de nerf.
Et comme si cela ne suffisait pas, dans les dernières pages, on trouve encore un autre index, général celui-là, par département et pays.
En sachant encore que Roger ne dort que d’un œil car il veille. Il se permet même des liftings réguliers sur son site. En effet, il suggère à ses lectrices et lecteurs de lui faire part des changements divers afin d’en faire profiter les autres auteur(e)s, toujours dans le même esprit de solidarité qu’au Calcre. J’adore !
Une fois qu’on y a gouté, c’est comme une drogue, on ne peut plus s’en passer. Ce pavé bien entendu a un prix de 59 euros, qui les vaut au centuple des aides et aiguillages qu’il peut apporter. Le Bartos les collectionne fiévreusement au chaud dans sa forêt du Médoc comme des documents précieux. Depuis que son éditeur a coulé, il en cherche un nouveau, un sérieux cette fois !
Je vous le conseille moi aussi, c’est un document de très grande qualité. L’indispensable Audace, c’est l’expression de l’auteur(e) en veine de trouver enfin un éditeur à sa pointure et sans parjure de son œuvre. Puisque comme le stipulait la feu (snif) revue Ecrire et Editer en sous-titre : « Un auteur averti en vaut deux ». Faites passer, Roger Gaillard a pondu un excellent Guide millésime 2013, à consommer selon un usage immodéré. Bon courage aux futur(e)s édité(e)s et aux auteur(e)s confirmé(e)s ou affirmé(e)s. Toutes et tous ensemble vont se régaler à chaque page de ce nouvel Audace, par la grâce et le talent de Roger (sacré) Gaillard, qu’elles et ils ne remercieront jamais assez de leurs louanges ! De l’Audace, toujours de l’Audace et que dieu me tripote, comme disait Pierre Desproges en phase œcuménique, quand les éditeurs se prosternaient à ses pieds pour obtenir qu’il leur roulât une pelle. Trop jouasse, Audace !
Guide Audace à l’usage des auteurs cherchant un éditeur de Roger Gaillard, collection poids lourd, éditions L’Oie Plate, 624 pages, mars 2013, 59 euros
Visuels, copyright Audace 2013 de Roger Gaillard aux éditions de L’Oie Plate