Le pitch :

Deux artistes au sommet de la gloire. Deux géants ! Richard Strauss (Michel Aumont) et Stéfan Zweig (Didier Sandre). Le premier, proche du régime nazi et se croyant tout puissant et intouchable, non concerné par la politique. Le second, craignant au contraire cette politique et la violence qu’elle allait sécréter. Ils s’admiraient. Ils créeront ensemble un opéra bouffe inspiré de Ben Johnson,« La Femme Silencieuse », immense succès arrêté dès la seconde représentation par le régime nazi, le nom d’un juif étant resté sur l’affiche malgré l’interdiction. Une fois encore la politique de la haine montrait son talent.

Notre critique :

Une belle, bonne et grande Pièce de Théâtre. U magnifique moment de Théâtre. COLLABORATION illumine les planches, touche au coeur, amuse, nourrit, divertit, interpelle et donne du sens. Il faut voir le bonheur des spectateurs en sortant de la salle, la chaleur des applaudissement après le spectacle.

De prime abord, il faut saluer l’Ecriture, l’adaptation de Dominique Hollier est une vraie réussite. Chaque mot sonne juste, on va à l’essentiel, on ne s’ennuie pas une seconde, il n’y a rien de gratuit dans cette pièce. C’est du travail d’orfèvre.

Les décors, la mise en scène, les costumes sont de très haut niveau avec des trouvailles d’une grande beauté comme ce voile noir qui transforme certaines scènes en des tableaux de peinture.
Élégance, sobriété, classe, on assiste à une pièce historique qui n’est jamais trop didactique ou scolaire mais nous donne un point de vue très pertinent sur la confrontation de deux grands artistes dans une des périodes les plus troubles du siècle dernier.

Tout est basé sur le champ lexical de la Collaboration, il s’agit d’une collaboration difficile, complexe entre deux génies très différents au sein de la "collaboration" avec l’ennemi nazi.

Au centre de cet écrin, il y a des comédiens, de grands comédiens, Michel Aumont et Didier Sandre en tête secondés par l’admirable, bluffante et prodigieuse Christiane Cohendy qui joue la femme de Richard Strauss, le personnage secondaire mais pivot de la pièce. Sans elle, sans son jeu rare d’une incroyable maîtrise et d’un grand naturel, il n’y aurait pas le même intérêt à assister à la confrontation Strauss/Sweig.

Michel Aumont est quant à lui un Richard Strauss exceptionnel, il a la carrure du rôle, le métier, le talent et ce petit quelque chose en plus qui fait que, par exemple, dans son monologue final, on est pris aux tripes, on est pris d’une énorme émotion que seul le théâtre peut aimer.

Didier Sandre est comme à son habitude magistral. D’une grande beauté et finesse, il est un Zweig touchant, émouvant, bouleversant.
Il incarne à merveille ce génie littéraire, érudit, noble, juste, entier et idéaliste, lui-même impressionné par la renommé et le talent de Strauss.

La collaboration artistique Aumont/Sandre restera dans les mémoires. Ceux qui aiment, vraiment, les comédiens prendront un grand plaisir à voir ces deux-là nous entrainer dans grande petite histoire au sein de la grande histoire tragique de la deuxième guerre mondiale et de ses prémices, tout en nous donnant des leçons de théâtre.

Mention spéciale également pour Eric Verdin qui force le respect et l’admiration dans le rôle de l’émissaire nazi de Goebbels. Plus vrai que nature, il est lui aussi d’une justesse remarquable, autant physiquement que dans son jeu, son placement de voix et son corps théâtral. Ce garçon-là est à suivre de très très près.

COLLABORATION est une des meilleures pièces de l’année, ne loupez pas ce moment-là de théâtre. C’est un moment historique, et je pèse mes mots. Merci aux artistes et aux artisans de ce petit chef d’oeuvre de la création.

Une pièce de Ronald Harwood, Texte français de Dominique Hollier
Mise en scène Georges Werler

Avec Michel Aumont, Didier Sandre, Christiane Cohendy, Stéphanie Pasquet, Patrick Payet, Eric Verdin, Armand Eloi. Décors Agostino Pace. Lumières Jacques Puisais. Costumes Pascale Bordet. Conception sonore Jean-Pierre Prevost.

THEATRE DE LA MADELEINE, PARIS.