Magnus Hirschfeld l’activiste de la fierté homosexuelle en Allemagne !

Magnus Hirschfeld l'activiste de la fierté homosexuelle en Allemagne !

Alors qu’en France les gays et lesbiennes vont obtenir le droit de se marier et peut-être même qui sait aussi d’adopter…. Magnus Hirschfeld (1868 / 1935) médecin et sexologue s’est battu toute sa vie contre le paragraphe 175 qui persécutait les homosexuels en Allemagne. Pour les nazis, il avait le gros défaut d’être à la fois juif, homosexuel et théoricien du « troisième sexe » s’ouvrant à tous les genres. Il créa l’Institut de Sexologie à Berlin, lieu de recherche scientifique unique en Europe. Trop souvent ignoré en France, sa vie, son œuvre et tous ses combats valent volontiers un article, aux temps héroïques de l’égalité des sexes et des sexualités, pas seulement consacrées à la procréation mais à la jouissance de la vie dans toutes ses potentialités duales.

Même si de mon point de vue simiesque de la démarcation entre les humanos et les animaux, chez nous les singes on ne se marie pas et le mariage nous indiffère les spasmes et les miasmes de nos pedigrees. Quant à l’homosexualité, elle est admise tout comme également l’éducation des rejetons par tous les sexes en présence et pas seulement avec les parents génitaux. C’est le Bartos qui a vachement insisté pour que je le ponde cet article à la Kong, d’autant que ce Magnus apparait comme l’un des personnages récurrents dans son roman « Dagmar » héroïne féminine et lesbienne lors de sa période berlinoise : http://www.syblio.com/dagmar

Magnus nait le 14 mai 1868 à Korlberg. Suite à ses études dans différentes villes, il commence à exercer la médecine générale avec une orientation vers la naturopathie et s’installe à Berlin dans le quartier de Charlottenburg. Dès 1896 il publie la brochure « Sappho et Socrate  » sous un pseudo et traite déjà de l’amour entre personnes du même sexe. Un an plus tard avec quelques amis, il fonde la revue « Der Eigene  » puis le Comité Humanitaire et Scientifique, première organisation au monde qui s’est battue pour la dépénalisation des relations homosexuelles qui étaient passibles de prison. Avec l’inique paragraphe 175 du code pénal allemand qui consacrait un article à « un acte sexuel contre nature entre des personnes de sexe masculin ou entre des êtres humains et des animaux est punissable d’emprisonnement, la perte des droits civils  ». Il ne sera aboli qu’en 1994, lors de la réunification des deux Allemagnes. « Paragraphe 175 : La déportation des homosexuels  », Rob Epstein et Jeffrey Friedman en 1999 lui ont consacré un documentaire poignant.

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En France toujours en avance sur son temps, c’est seulement en 1982 que les poursuites contre les homosexuels sont supprimées presque exæquo avec l’OMS qui stipula le 12 juin 1981, que l’homosexualité ne figurait plus dans les maladies mentales !

Quel a été l’élément déclencheur de l’activisme forcené de Magnus ? « La voix grave, il (Magnus) me conta la cicatrice indélébile qui lui drainait la conscience depuis que l’un de ses patients homosexuels, au début de son exercice de la médecine, avait mis fin volontairement à ses jours, la veille de son mariage. Il ne supportait pas le consensus mou de cette société prête à broyer des citoyens qu’elle considérait de seconde zone. Sous prétexte que de par leur mode de vie sexuel, ils remettaient totalement en question le fondement de l’édifice familial de la reproduction  ». (in Dagmar pages 147 / 148 copyright éditions Kirographaires 2012)
Les voix de Boutin et de ses ami(e)s calotins ne me démentiront pas !

Dès 1897 Magnus et son comité lancèrent une large pétition pour l’abrogation du paragraphe 175 qui reçut plus de 5000 signatures dont celles d’Albert Einstein, Hermann Hesse, Thomas Mann, Rainer Maria Rilke, Léon Tolstoï, Stefan Zweig…. En vin hic ! Combien en France de nos jours, de pseudos intellos engagés (ça existe encore ? !) mouillent leur chemise blanche pour la cause homosexuelle ?

Il faut dire que le Magnus était visionnaire dans sa théorie du « troisième sexe  » bien avant en voiture Simone  ! Il avait perçu les motivations sexuelles qui s’organisaient selon une échelle qui s’étendait entre les marches de la masculinité et la féminité, qui comptaient dans ses strates : les homosexuels des deux genres, les transsexuels jusqu’aux transgenres actuels. Il proposait l’homosexualité comme un processus inné qui relevait du médical et de ce fait aucune loi ne devait la régir. Il se retrouvait tel qu’en lui-même dans sa citation : « Une âme de femme prisonnière d’un corps d’homme  ».Mais à trop vouloir se réclamer des blouses blanches, d’autres homosexuels refuseront cette appellation contrôlée sous la bannière enflammée d’Adolf Brand, le bien nommé incendie dans sa traduction littérale. Un individu de cette trempe se réclamant du cocktail mondain détonnant de Goethe à Nietzche dans un célèbre cabaret homo. « Il tonnait que l’homosexualité et l’anarchisme étaient indissociables et (que) chacun devait se prononcer pour la libre sexualité des entrains de son corps en dehors de l’église, de l’état, des médecins et de la morale bourgeoise ». (in Dagmar page 178 copyright éditions Kirographaires 2012). Le même lascar a son opinion bien tranchée sur la question des luttes de Magnus. Il s’adresse à Dagmar : « Ah cet Hirschfeld ! Ce juif putatif humaniste amant de la gauche réformiste ! Cet ignoble individu qui désire médicaliser l’homosexualité pour la rendre présentable à ses amis, les tenanciers de la haute finance. Des youpins pareils à lui, qui thésaurisent et mettent à genoux la société empêtrée dans une crise sans précédent. Alors vous, rudimentaire femmes sans catégorie, vous n’avez pas le droit à la parole. Je vous chie à la raie  ». (in Dagmar page 179 copyright éditions Kirographaires 2012).
Les propos du personnage n’engagent que son blaze de personnage littéraire !

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L’Institut de Sexologie de Magnus Hirschfeld comportait un jardin naturiste mixte et comptait une bibliothèque de plus de 20 000 ouvrages qui seront brûlés, tout comme son bâtiment, par les nazis lors de l’avènement du petit peintre viennois raté en 1933, Ce feu portait déjà en lui les germes du symbole de l’un des premiers autodafés, à se chauffer la peste brune par les flammes de la connaissance partie en fumées.

Les femmes n’étaient pas exergues de son intérêt. Le sort des lesbiennes ou hétérosexuelles, la planification des naissances, les plaisirs sexuels à disposer de son corps sont aussi des sujets qui rentraient en ligne de compte dans son Institut. Il eut la vie sauve d’avoir quitté l’Allemagne à temps en 1930. Erich Müsham militant anarchiste des Conseils Ouvriers de Bavière fut l’un des premiers internés dans les camps de la mort et dépecé vivant. Kurt Hiller du Cabaret-Néo-pathétique, inventeur du terme expressionniste, pacifiste humaniste, bras droit et amant de Hirschfeld et père adoptif de Dagmar fut aussi déporté mais en réchappa.

En procédant à l’amalgame « homosexualité, marxisme et traitrise juive », le régime nazi mit aux arrêts 100 000 hommes entre 1933 et 1945 pour délit d’homosexualité dont 10 000 vers les camps. A peine 4000 revinrent vivants. La déportation des triangles roses relevait d’un acte politique de destruction massive d’êtres humains considérés comme le « chancre social ».
Les sociaux-démocrates, dont était membre Magnus, utilisèrent le même stratagème de dénigrement pour cause d’homosexualité, que les nazis afin de discréditer leurs ennemis politiques. C’est ainsi qu’éclata au grand jour le scandale autour de Röhm, compagnon de Hitler des premières heures Il fut accusé d’homosexualité à la tête des SA (premiers groupes paramilitaires nazis), les mêmes qui brûlèrent l’Institut de Magnus. Profitant de la Nuit des Longs Couteaux, pour aiguiser son pouvoir au nom d’une certaine morale de purification éthique, Hitler stabilisa son pouvoir hégémonique sur tous les fronts en éradiquant Röhm et sa bande.

Magnus Hirschfeld quitta ce bas monde à Nice, le 14 mai 1935. Il était âgé de 67 ans. Il a été un pionnier du mouvement homosexuel en Allemagne.

J’ai emprunté la vignette de mon article à l’illustration de la plaquette hommage à Magnus Hirschfeld du MDH (Mémorial de la Déportation Homosexuelle)