La révolution pacifique en Islande et la répression dont on ne parle jamais !

La révolution pacifique en Islande et la répression dont on ne parle jamais !

On ne peut que se réjouir de toutes les révolutions dans les pays arabes qui mirent à l’index les dictateurs. Encore plus proche de nous, l’Islande, passée sous silence par presque tous les médias, se réveille ! Comme un volcan en ébullition, elle a su manifester brillamment la ferveur populaire indignée dans les rues de Reykjavik, assiégeant le Parlement depuis la faillite du système bancaire en 2008. Jusqu’à se débarrasser de la droite au pouvoir et son sosie la gôche libérale et votant le non remboursement des banques en déroute. Sans omettre certains travers de répression à l’encontre de 9 libertaires et autonomes. Elle a élu une nouvelle assemblée constituante le 27 novembre 2010 qui traduira par les nouvelles lois, la colère populaire contre le mode de fonctionnement capitaliste moribond qui se fonde désormais sur un soi-disant commerce équitable et le développement durable !

Un bref aperçu de cette île étrange de 330 000 habitants qui inspira Jules Vernes. Un autre monde où la télé était coupée des cerveaux disponibles une fois par semaine pour les désintoxiquer. Elle compte le plus grand nombre d’artistes d’en avant la zizique en passant par les plumitifs, par tête de pipe. Elle créa en 930 l’Althing, le plus vieux parlement de la terre à la lune et est devenue enfin indépendante en 1944, après avoir été sous domination norvégienne et danoise. C’est le pays sous l’ère viking, qui au lieu de châtier et emprisonner les personnes coupables d’un délit, préférait les bannir des territoires de l’île. Je passe sur les sagas magnifiquement traduites par Régis Boyer, ces contes épiques qui se déroulaient durant la période de colonisation de l’Islande. Elles se lisent comme un film à livre ouvert, tellement les actions et les interactions entre les personnages sont riches de rebondissements. Attention tout de même à ne pas trop s’emmêler entre les patronymes ni jouer la pantomime entre les volcans qui se gèlent les cratères en bord de mer et fusionnent les scories géologiques. Richesse garantie de la géographie humaine autant que des paysages sans âge.

Elle était une fois classée au deuxième rang mondial sur l’indice du développement humain en 2006.

En 2008, L’Islande a dû faire face à la faillite brutale du système bancaire due à des margoulins très compétents dans l’arnaque des affaires planétaires. La faillite de la banque Icesave issue de fonds principalement anglais et hollandais, intima l’ordre au parlement de passer au vote le renflouement des banques. Soit un bakchich de 3,8 milliards d’euros, pour rembourser les malversations bancaires par tous les contribuables vaches à lait, au minimum sur dix ans. Soit une nouvelle dîme d’un montant de 100 euros par mois et par habitant. Le FMI, chacal de service saigna encore un peu plus l’île et proposa ses largesses à raison de 2, 1 milliards de dollar, histoire, il était une fois le renflouage du navire capitaliste qui prenait l’eau de tous les côtés. La belle affaire juteuse !

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En décembre 2008, une trentaine de personnes pacifiques de la mouvance libertaire / autonome et écolo prirent d’assaut le Parlement de Reykjavik pour lire un communiqué de protestation. En temps normal l’accès aux tribunes publiques était ouvert aux citoyennes et citoyens. Les manifestant(e)s parvinrent à accéder à la tribune, mais les forces de l’ordre prirent ombrage de cette situation et créèrent un chahut. Un an plus tard, 9 sur ces 30 personnes prirent le masque de bouc émissaire pour le pouvoir et furent accusés d’avoir menacé l’autonomie du parlement, encourant une peine de un an de prison jusqu’à perpétuité (16 ans en Islande). En janvier 2011, le couperet de la répression tomba. Parmi ce groupe surnommé « Reykjavik 9 » en majorité des jeunes des deux sexes, cinq furent acquittés, et quatre morflèrent la répression pour l’exemple. Deux prirent une amende de 100 000 couronnes islandaises, l’un quatre mois de prison avec sursis et le dernier 60 jours de prison avec sursis.
En janvier 2009 bonne année, chaque samedi, des milliers d’Islandais(e)s manifestèrent leur mécontentement devant le Parlement selon le dénominateur bruyant de « la révolution des casseroles ». Le tintamarre cassa les tympans du parti conservateur au pouvoir, tant et si fort qu’il jeta l’éponge. La musique des batteries de cuisine en Islande adoucit les mœurs politiques, y’a pas à dire !

Avril 2009, avec la danse de l’alternance aux élections législatives, une coalition de gôche l’Alliance radina au pouvoir des sociaux-démocrates maqués à des féministes et autres ex communistes et même au mouvement des Verts de gauche. Le président islandais pas du tout omnipotent et tripotant du pouvoir, comme dans certaines républiques bananières hexagonales qui se targuent des droits de l’homme, sous la pression populaire soumit au verdict un référendum quant à la politique de remboursement. C’est à 93 % que le peuple refusa de se saigner pour perdre son emploi et son logement au nom d’arnaqueurs boursicoteurs au cœur léger. Le Président renchérit dans le lard : « Peut-on demander aux gens ordinaires – les agriculteurs et les pêcheurs, les enseignants, les docteurs et les infirmières – d’assumer la responsabilité de la faillite des banques privées ? Cette question qui fut au cœur du débat dans le cas de la banque islandaise Icesave, va être la question dans de nombreux pays européens ». Bonne question à propos d’un système vérolé qui nous berne jusqu’à son dernier souffle avec sa nouvelle arnaque autour du développement durable et l’écologie d’adaptation au désastre ! (Lire à ce propos, l’excellent dossier : « S’adapter au désastre » in la Décroissance de mars 2011, 2,20 euros)

Sur sa lancée, avanti populo la révolution en marche, le peuple, pas du tout dupe des magouilles de ces enfants de salop sociaux hypocrites et si libéraux shootés à l’entrée dans l’union européenne, mit aux voix une nouvelle assemblée citoyenne et constituante, le 27 novembre 2010. C’est dingue que chez ces gens-là, ils étaient vraiment dignes de la nuit franchouillarde du 4 août 1789 où fut votée l’abolition des privilèges ! Un appel à candidature fut annoncé et 522 personnes citoyennes et citoyens de base répondirent présent(e)s et 25 furent élues constituant(e)s. Parmi les propositions phares, notons particulièrement, la séparation de l’église et de l’état, la nationalisation de l’ensemble des ressources naturelles, une séparation claire des pouvoirs exécutifs et législatifs, le rôle et la place du président de la république… Pince-moi si je rêve, un autre futur est possible ? !!! Ben oui, quoi ! Lé révolution populaire de la rue d’un coup a déchiré la constitution islandaise obsolète de 1944 pour se colleter au réel et à d’autres alternatives sociales qui métraient au rebut le capitalisme, ce que Proudhon appelait le « droit d’aubaine »

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Pour adouber la prose de Proudhon qui avait tâté du suffrage universel pour se faire élire un temps très court et savait dont parfaitement de quoi il retournait, et pour coucher mes doutes malgré tout dans le contexte islandais, je reviens à citer ce macho misogyne d’affreux Joseph : «  Rien n’est moins démocratique que le peuple. Ses idées le ramènent toujours à l’autorité d’un seul ». A voir sous les cieux plus cléments de l’Islande. A suivre aussi si les infos sont diffusées …

Enfin, un dernier mot, si j’ai voulu parler de la révolution islandaise, c’est qu’elle a été pour ainsi dire absente des médias officiels, comme si cet exemple à une échelle réduite d’une petite communauté d’humains indignés qui ont voulu prendre leur destinée en main sous des cieux plus fraternels, ça pourrait peut-être donner des exemples et des idées en actes à suivre par chez nous en Europe ! Qui sait ?

Je vous laisse méditer ces questions primordiales d’un autre futur possible en suspend. J’ai été très heureuse d’évoquer cette vision de la révolution pacifique islandaise, que jamais on ne taise !