Boris Vian précurseur : "Le Swing et le Verbe"

Boris Vian précurseur : "Le Swing et le Verbe"

Le Bartos prétenciard et chiard comme à son habitude, lui qui se disait tout connaître de l’existence écourtée de Boris Vian, est reparti la queue basse revoir sa copie. La lecture de ce bath de chez bath livre nous ouvre toutes les facettes de ce cher Boris créatif inconsolable, touche à tout de génie, à la croisée des chemins de la verve et toutes ses expressions à cœur fendre, du jazzologue et trompettiste à la chanson, l’opéra, la littérature, le pataphysicien, du traducteur au conseiller artistique et j’en passe des astiques !

Quand je songe qu’il y a un temps incertain, on obligeait les mômes à lire L’Écume des Jours et que des bahuts même portaient le nom de Boris Vian voir de l’ami Jacques Prévert. Quelle injure à ces personnages insoumis aux carcans de la norme apprise et formatée !

C’est comme réduire Boris à sa littérature (au moins 10 romans et des nouvelles multiples) incomprise et boudée de son vivant avant qu’il n’empreinte le blase de Vernon Sullivan et dépose les armes pacifiques de son existence critique et inventive, le jour de la projection justement du film J’Irai cracher sur vos Tombes. Il participa du même humour macabre et désinvolte d’un Léo Ferré qui calancha sa Graine d’Ananar un 14 juillet !

Bison Ravi alias Boris ne laisse pas indifférent. 25 ans d’écriture jazzistique autour du Duke, Dizzy, Louis, Miles… ça vous swinge un singe et un bonhomme. Ainsi, par un phénomène réconfortant, ce que de stupides critiques ont appelé "musique de sauvage" est devenu, par le monde entier, la seule musique qui transcende les nationalités et les croyances, qui chasse les préjugés sous le formidable coup de balai de la détente et de la joie et qui mérite seule peut-être l’épithète de musique civilisée (Boris).

Il avait l’art de la polémique qui justifiait de retourner l’argument de ses détracteurs avec l’aisance d’une fine mouche qui pique. Le Déserteur en est un des plus fameux exemples des combats heureux de Boris. Sa réponse au maire de Dinard : ce n’est, je l’ai déjà dit, pas du tout une chanson antimilitariste : c’est simplement une chanson procivile. Il y a une nuance. Le métier de militaire consiste à faire la guerre ; le rôle du civil consiste à chercher à l’éviter. On considère généralement que tous les moyens sont bons pour faire la guerre ; qu’il me soit permis de penser que l’usage d’une chanson est aussi correct que celui d’un fusil.

Je connais une autre mouche de mes amis en la personne de Ramon Pipin. Je ne vous dis pas l’émotion lorsque en page 202, le manuscrit de Rock-hoquet, chanson écrite en 1956 et reprise par les Au bonheur des Dames m’éclaboussa la tronche. Je connaissais la version chantée par la bande à Ramon. L’écriture de Boris, ses ratures à l’encre marine sur le papier et c’est le jet de l’humour rock pour la grande déconne avec ses zarbis partenaires de l’époque : Henri Cording (Henri Salvador) et Mig Bike (Michel Legrand). Une fois de plus dans son œuvre, Boris fut un précurseur avant tous les pleureurs, ces éjaculateurs précoces qui se réclamèrent du rock pour se vidanger des couilles en or. Boris explora le rock en France avant tout le monde rien que pour de rire.

Il y aurait copieusement à écrire, tant toutes les pages de ce fabuleux livre m’effleurent des larmes d’amour fou pour le bonhomme. Tu m’étonnes 300 documents et 45 fac-similés sertis par trois auteurs au top de la connaissance de Boris et qui prennent leur pied à partager. Chapeau à tous les trois et MERCI.

J’ai envie de finir mon papier avec une facette très peu connue de Boris auteur du livret du « Chevalier de neige », opéra qui opéra un franc succès en 1953 et 1957. Enfin, Boris qui jette des ponts entre toutes sources sonores qui honorent ses esgourdes parfaites. J’aimerais mieux pour ma part voir un musicien (de jazz) puiser son inspiration dans Ravel, Stravinsky ou Alban Berg que les pas redoublés et fanfares qui constituent le répertoire de l’orphéon de Sucy-en-Brie : la matière puisée est tout de même susceptibles d’autres développements.

Boris Vian Le Swing et le Verbe, par Nicole Bertolt, François Roulmann et Marc Lapprand, éd. Textuel, (novembre 2008), 244 page, 49,90 €