Menottage au sol : une procédure mortelle

Menottage au sol : une procédure mortelle

Samedi 7 mars 2009, trois cents manifestants se rassemblaient dans les rues de Grasse pour défiler jusqu’au Commissariat de la ville. Depuis le 9 mai 2008, jour maudit de l’arrestation policière plutôt musclée et de la mort par asphyxie d’un jeune homme de 22 ans. La méthode du menottage au sol revient au devant de la scène car elle est à l’origine de plusieurs décès constatés à travers le monde et dénoncés par Amnesty International.

Cette technique dangereuse comporte une clé de cou et de bras ainsi qu’une compression de la cage thoracique à l’aide d’un genou. Le menotté se trouve alors dans un état de détresse respiratoire et ne peut se rebeller bien longtemps par manque d’oxygénation. Même le plus costaud des bûcherons ne pourrait se débattre sans pouvoir respirer. Une fois le menottage réalisé dans le dos, il y a lieu de relâcher la prise immédiatement afin qu’elle ne devienne pas funeste pour la personne interpellée. L’individu n’est alors plus en état de nuire puisqu’il est allongé face au sol et ne peut plus se servir de ses bras pour se relever.

Les manifestants de samedi dénonçaient, par leur présence, la tournure du procès qui a visiblement été bâclé sur nombre de détails très importants... pour ne pas dire fondamentaux ! On notait la présence de militants du NPA d’Olivier Besancenot, de la ligue des Droits de l’Homme, du RESF et du MRAP. Autant dire que la mémoire d’Abdelhakim Ajimi n’était pas oubliée.

Suite à la saisine par la partie civile de la Chambre d’Instruction de la Cour d’Appel d’Aix en Provence, la 12ème Chambre se réunira mardi 10 Mars 2009 à 14 heures, aux fins d’un complément d’expertise qui à priori s’impose dans la mesure où pour l’heure la famille de la victime a selon leur avocat Me Sylvain Pont, la détestable impression que la Justice souhaite poser, par tous moyens, une chape de plomb sur cette affaire. Il y a donc urgence à agir sur le plan procédural, avant que le ciment de l’injustice ne se fige à jamais. Sans vouloir porter atteinte à l’institution policière, cet avocat niçois a donc bien raison de rappeler par ailleurs qu’un fonctionnaire de Police, comme n’importe quel autre professionnel, peut commettre une erreur. Mais cela ne doit pas l’empêcher d’assumer ses responsabilités lorsqu’il a eu, manifestement, un comportement inadapté aux exigences de sa fonction !

Il va falloir déterminer tout le cheminement qui a débouché sur le décès du jeune Ajimi. Cette mort est intervenue sans intention de la donner, mais il faut établir la part de responsabilité des deux Policiers en cause. Pourquoi avoir voulu maintenir aussi longtemps cette clé de cou et cet écrasement diaphragmatique... surtout après la réalisation du menottage ! Pourquoi une mise en examen n’a-t-elle pas été prononcée jusqu’à maintenant et cela malgré un rapport d’autopsie incomplet mais plus qu’accablant. La synthèse post mortem n’est-t-elle pas trop synthétique, ce qui permettrait d’exclure l’implication des fonctionnaires de Police dans le processus de la mort.

Existe-t-il une concordance entre les constatations médico-légales et les faits. Les gestes violents, d’étranglement et d’écrasement, pratiqués lors du menottage ont-ils pu — oui ou non — conduire à l’asphyxie de la victime qui avait également les voies aériennes supérieures en partie obstruées. Les antécédents psychologiques (et non psychiatriques) d’Abdelhakim Ajimi ont-ils un rapport avec l’état d’agitation décrit par les Policiers et n’est-on pas agité lorsqu’on étouffe et qu’on ne peut plus le dire. Pourquoi les premiers gestes de réanimation n’ont-ils pas été pratiqués par les Policiers (tous secouristes), avant l’arrivée des Pompiers.

Quel temps s’est écoulé entre les constatations des Policiers, qui ne voyaient plus bouger le jeune Ajimi, et l’arrivée de l’équipe d’urgence. Quel était l’état de la victime à l’arrivée des secours spécialisés... pourquoi autant de zones d’ombre n’ont-elles pas été éclaircies et surtout dans quel but.

Si le fils du Président de la République était décédé dans les mêmes conditions, toute la vérité aurait été faite... alors considérons que le fils Ajimi est aussi important que le fils Sarkozy !