Comment Nicolas Sarkozy pourra-t-il baisser les Salaires ?

Comment Nicolas Sarkozy pourra-t-il baisser les Salaires ?

Le refus élyséen d’accorder une augmentation substantielle des plus bas salaires outre-mer montre bien les limites de la politique sociale de Nicolas Sarkozy, tout occupée qu’elle est à fournir des capitaux à une ribambelle d’entreprises des différents secteurs d’activité qui se retiennent de sombrer dans un gouffre sans fond. La crise bancaire agite le spectre de la déflation depuis plusieurs mois, mais il semble bien qu’il faille s’y faire. Le rétrécissement du PIB n’y suffira pas.

La mise en œuvre des 35 heures à la fin du millénaire a provoqué le gel des salaires, à peu près pour tout le monde. Dans une étude, sur la décennie 1999-2009, la dernière année marque un point de rupture. Aucune fonction ou presque n’enregistre de progression salariale, alors que la décennie passée a connu deux périodes de forte hausse entre 1999 et 2001, puis entre 2004 et 2007, rappelle Antoine Morgaut, directeur pour l’Europe du cabinet Robert Walters.

Aux États-Unis, on estime que 20% des cadres devront accepter une réduction de salaire. En France, les jeunes qui ne revoient pas à la baisse leurs prétentions salariales ont déjà les pires difficultés à entrer sur le marché du travail, explique-t-il. En revanche et sur la même période, un directeur financier a par exemple vu sa rémunération grimper en moyenne de 60%. Deux poids, deux mesures. Les syndicats sont convaincus, à 2 jours de la réunion qu’ils vont tenir à l’Élysée, que la partie n’est pas facile à jouer pour eux, et qu’il leur faudra pour certains entamer un nouveau bras de fer, tandis que d’autres, comme François Chérèque, se sont déjà déclarés prêts au compromis.

Les 8 organisations syndicales se retrouveront le 23 mars pour analyser les résultats du sommet de mercredi et décider de la suite du mouvement. Le chef de l’État a lancé plusieurs pistes à la télévision en vue de la rencontre avec les syndicats, sans aller toutefois vers une relance par la consommation. Il a évoqué une baisse d’impôt pour les classes moyennes basses, une couverture chômage exceptionnelle pour les jeunes de moins de 25 ans, la distribution de chèques emploi-service ou encore un partage des profits des entreprises. Mais les syndicats, certains qu’un tiens vaut mieux que deux tu l’auras, souhaitent des mesures salariales, dont un coup de pouce au Smic, une indemnité mensuelle pour les jeunes, et des mesures concrètes de nature à limiter les licenciements.

L’idée du partage des profits est une vieille lune, issue du capitalisme social en vogue après la 2ème guerre mondiale, et lancée après bien des atermoiements par le général de Gaulle. Dans les années soixante, la part de la valeur ajoutée revenant aux salariés a flirté avec les 70%. Elle a même largement dépassé ce chiffre à la fin des années soixante-dix. Avant de redescendre drastiquement après le tournant de la rigueur en 1983. Depuis les années 1990, leur part s’est stabilisée à 65% de la valeur ajoutée.

Ce niveau pourrait justifier un rééquilibrage en faveur du salarié. Toutefois, vouloir y parvenir en modifiant le partage des bénéfices entre salariés, actionnaires et investissements en 3 parties à peu près égales, comme le propose Nicolas Sarkozy, relève du jeu de dupes, prévient l’économiste Philippe Askenazy. Selon lui, toute augmentation de la distribution des profits de l’entreprise vers les salariés se ferait au détriment de leur salaire. La méthode est pourtant déjà prête à l’usage : contre un effort consenti par le salarié sur le niveau de sa rémunération, il serait opportun de le motiver aux objectifs de l’entreprise en y ajoutant une part variable, ajustée sur les profits réalisés autant que sur les objectifs personnels atteints.

C’est que les entreprises éprouvent à l’heure actuelle de nouveaux besoins en terme de gains de productivité. Après plus de 20 ans de croissance à deux chiffres de son résultat net par action, L’Oréal par exemple, a renoncé à un tel objectif en octobre, tablant sur une progression comprise entre 7% et 8%. Affecté par le violent ralentissement de ses principaux marchés en fin d’année, le groupe cosmétique a vu son résultat opérationnel 2008 reculer de 3,6% et n’a pas donné d’indications sur ses perspectives 2009. dans un communiqué. L’environnement économique sera certainement encore difficile et nous y sommes préparés, affirme Jean-Paul Agon, directeur général, tout en se disant confiant dans la capacité de L’Oréal à traverser avec succès cette conjoncture économique adverse et même à en sortir renforcé.

Les ventes de L’Oréal ont particulièrement souffert sur le marché nord-américain, où elle ont chuté de 11,6% en données comparables au 4ème trimestre, signant une baisse de 4,8% sur l’année et, dans une moindre mesure en Europe de l’Ouest. Dans les pays émergents, elles ont bien entendu mieux résisté, mais leur croissance a nettement ralenti (+9,0%) par rapport à la celle des neuf premiers mois (+15%). La concurrence mondiale est une fois de plus en cause, et les salariés français devront s’aligner tant qu’il leur sera possible sur le niveau des salaires asiatique. Le spectre du chômage devrait les y aider…

 

 


Si tous les progrès faits ne sont pas populaires,
La crise a juste offert des raisons d’être amer
Dans les terroirs, et puis, ailleurs en outremer :
Il est temps maintenant de baisser les salaires !

S’il nous fallait pousser les rapports ancillaires,
Les bras croisés voudront gouverner le steamer,
Nous préférons de loin les gens du pays khmer
Tempérants, circonspects et moins atrabilaires…

Sans faille et sans répit pesons sur les emplois,
Et sans détour, des gens exigeons des exploits
Pour ne rien préjuger de nos actions contraires.

Songeons aussi à joindre au joug la main de fer
Tant qu’elle est suspendue à des fins arbitraires,
Et tous ensemble, allons sans frémir vers l’enfer.