Gare aux champignons qui tuent !

Gare aux champignons qui tuent !

Les champignons tuent. Cette réalité reconnue, mais encore méconnue
par nos citoyens, est aujourd’hui le sujet de larges campagnes de
sensibilisation initiées par le ministère de la Santé ainsi que les
spécialistes suite à la vague de cas d’intoxication qui a touché dix
wilayas du pays causant ainsi un lourd bilan de décès, dont des
enfants, et provoquant l’hospitalisation d’urgence de nombreux autres.

A Bordj Bou-Arreridj, Khenchla, Jijel, Guelma ainsi qu’à d’autres
wilayas, l’on signale aujourd’hui plusieurs cas d’intoxication causés
par l’ingestion de champignon toxique sauvage. Les spécialistes sont
unanimes. Il est impératif d’adopter un plan de lutte et de
prévention, axé premièrement sur la sensibilisation de la société
civile ainsi que l’interdiction rigoureuse de la vente de cette plante
dans les marchés et sur les routes. « La consommation de champignon
toxique est à même d’engendrer la mort si une assistance médicale
rapide n’est pas assurée à la personne intoxiquée, d’où les décès
signalés dans quelques régions rurales dont les habitants se trouvent
à des centaines de kilomètres, loin des structures sanitaires », révèle
une spécialiste en toxicologie.

En effet, les spécialistes s’accordent à confirmer que le phénomène
prend une ampleur inquiétante et ce, eu égard aux « changements
climatiques qui ont favorisé l’évolution, sur nos terres, de
nombreuses espèces de plantes de champignons dont la toxicité est
fatale pour notre santé », estime Dr Ouaguenoune, médecin généraliste.
Elle signale également que les pluies torrentielles ont beaucoup
contribué dans l’évolution de ces espèces.

Sur un autre chapitre, la spécialiste met en cause le mode de
cueillette des champignons, opéré souvent par des jeunes ignorant en
la matière. « Le monde des champignons est très complexe. Parmi les
milliers d’espèces présentes dans nos forêts et campagnes, seule une
trentaine serait dangereuse pour l’homme. Cependant, la reconnaissance

de ces espèces dangereuses est souvent peu évidente pour le profane »,
déclare-t-elle. Et d’ajouter que la confusion qui se fait entre un
champignon toxique et un champignon comestible est l’une des premières
causes d’intoxication. Elle ajoute sur un autre chapitre qu’en cas
d’intoxication, le problème de l’identification est bien souvent
insoluble et il ne reste plus que la clinique pour se faire une idée
de la toxicité du champignon ingéré.

La malvie derrière la propagation du phénomène

Dans un autre contexte, des observateurs avertis nous apprennent que
la consommation des champignons est entrée dans les habitudes
alimentaires de nombreuses familles algériennes. Les conditions de vie
déplorables poussent les gens, particulièrement, les enfants à
recourir à la vente des champignons, dans les marchés et sur le bord
de la route, un commerce fort lucratif.

« Je vends depuis longtemps des champignons, récoltés par les enfants
de la forêt, à mes clients qui sont nombreux. Je n’ai aucune idée de
ce qui fait la différence entre un champignon toxique et un autre
comestible. Tout ce qui m’importe est que mes nombreux clients
achètent les champignons à 150 DA le kilos, ce qui me permet de gagner
ma vie », témoigne Mohamed, jeune vendeur âgé de 18 ans.
En effet, si en Europe et en France la récolte des champignons est
soumise à des règles rigoureuses et est effectuée par des spécialistes
en la matière à même de différencier entre un champignon comestible et
un autre toxique, en Algérie la cueillette se fait d’une manière
extrêmement anarchique, d’où ces cas d’intoxication mortelle.

Des cas d’intoxication dans plusieurs wilayas

L’automne est la période propice à la survenue de la majorité des
intoxications. Le nombre des cas signalés témoigne, par ailleurs, de
l’ampleur de la situation. En effet, l’on apprend de sources proches
du ministère de la Santé que plus de dix wilayas sont affectées par
cette poussée d’intoxications. Bord Bou-Arreridj se trouve à la tête
des wilayas touchées avec 3 décès et 24 victimes hospitalisés dans les
hôpitaux d’El Bordj, d’El Ketar, et de Bab el-Oued. L’on enregistre
aussi deux décès et 14 intoxications. Il est à signaler que le chef du
service de médecine légiste du CHU de Constantine a signalé encore
quatre cas de décès, dont des enfants, lors de ces derniers jours.
L’autopsie avait révélé que le motif du décès est une intoxication
occasionnée par un champignon toxique.

Un plan de lutte pour contrecarrer le fléau

Pour endiguer le phénomène des intoxications, le ministère de
l’Intérieur et des Collectivités locales exhortent tous les walis,
présidents d’APC et chefs de daira à adopter des mesures rigoureuses
dont l’interdiction de la commercialisation de tous les types de
champignons ainsi que la soumission de l’opération de la récolte de
ces plantes à des règles strictes. Dans le même contexte, les services
de sécurité et les équipes compétentes du ministère du Commerce et les
bureaux municipaux d’hygiène ont procédé à la saisie des champignons
vendus le long des routes.
Il est à noter enfin que le ministère de la Santé met en garde les
citoyens contre la consommation des champignons sauvages et ce, au
égard à leur grande toxicité susceptible d’engendrer la mort.