Frédéric VIGNALE, portrait d’un Dandy touche-à-tout

Frédéric VIGNALE, portrait d'un Dandy touche-à-tout

C’est un cas à part dans le PAF, la littérature, la réalisation et surtout sur la toile. Le parcours atypique de Frédéric Vignale, sa plus grande fierté, attise jaloux et envieux. Dans le grand jeu de société qu’est la vie de cet artiste touche-à-tout de 35 ans, l’année 2008 tombe sur la case Cinéma. S’il tire une carte chance il piochera sans doute musique. Le tour finira certainement sur le bonus Internet, principal QG du sieur.

Rien ne prédestinait cet étudiant en lettres, originaire de Metz, à devenir l’un des anonymes les plus connus de notre siècle.

C’est en 1998, alors âgé de 25 printemps, que Frédéric Vignale découvre l’informatique. Deux semaines plus tard, les ordinateurs n’ont plus de secrets pour lui. Il entend alors parler d’un écrivain, un certain Frédéric Beigbeder, « j’ai plus ou moins créé son site officiel pour le fun  ».

Même prénom, même culot, le monde parisien confond les deux et Vignale se voit invité par des célébrités. « J’étais invité chez Yann Moix, on s’est lié d’amitié, le surlendemain, j’avais un rendez-vous pour devenir chroniqueur chez Dechavanne sur Ciel mon mardi !  ».

Mais en 2000, un pitch sur ce qui se passe sur Internet ne fascine pas l’animateur. Mésentente entre les deux, Frédéric Vignale est remercié 1 mois après...

Peu importe, l’homme, non-journaliste, lance alors www.e-terviews.org. Plus de 500 interviews écrites par échange de mails y sont recensées, « un concept jusqu’ici inédit ». Il en sortira 44 d’entre eux dans un livre (1) et fermera son site pour en ouvrir un autre.

Le 1er janvier 2003 www.lemague.net est lancé. Innovant, un poil satirique, le contenu est un pêle-mêle d’articles, critiques et chroniques signés par Vignale lui-même ou d’autres rédacteurs, « près de 230 personnes bossent dessus !  ».

En cinq ans, Le Mague devient populaire, reconnu, «  entre 8000 et 50 000 visites par jour » explique le volubile. «  C’est une phrase qui a fait un déclic : Ne critiquez pas les médias mais créez le votre. Du coup, passionné par l’art, j’ai lancé Le Mague  ».

Aimant les collages et l’art plastique, il sort discrètement 11 septembre, 11 nouvelles (2).

Mais l’homme n’en vit pas et il doit trouver un «  vrai travail  ». Une fois encore le destin, la chance ou le hasard, lui fait croiser une députée. Elle le charge de faire son site Internet, d’écrire pour elle, il devient chargé de communication au Parlement Européen.
Un rôle qui convient bien à ce dandy bavard, sûr de lui mais qui ne supporte pas d’avoir un patron. Il travaille aussi à Radio Canada, toujours comme chroniqueur.

Et puis en 2006, Frédéric Vignale essaye un autre jeu, une autre passion et réalise son premier court-métrage, Réserve Naturelle, avec le chanteur Eduardo Pisani, désormais traditionnel complice du metteur en scène amateur. Le début d’une lignée de petits films en noir et blancs, muets ou musicaux, dont La femme à la valise reste une pépite artistique. « Je prouve qu’avec 3 euros on peut faire du bon cinéma, j’essaye de créer une nouvelle ‘nouvelle vague’, le noir et blanc, muet, ça peut marcher ! ».

L’année 2007 sera la plus belle pour celui qui se voit comme un « Johnny Depp obèse », à cause, ou plutôt grâce à celui qui l’aida jadis et qui renouvella son offre de façon involontaire. Le Yann Moix, invité dans l’émission l’Arène de France de Stéphane Bern, apprend que Vignale est présent comme guest. Sans trop d’explications, l’artiste est mis à la porte suite à la demande de l’écrivain/réalisateur, et ancien ami, Moix.

Les raisons restent obscures, « il m’accuse de dire des choses nauséabondes et obscènes sur lui, il a peur que je dévoile des choses de sa vie privée ». Dans le doute, ne sachant comment réagir, Frédéric appelle son avocat, Maître Gilbert Collard, qui lui conseille de partir. Quelques mois après ils en tireront un livre  : Les Censurés de la Télé (3), un témoignage de personnalités du petit écran sur la Censure.

Le multiface se tourne aussi vers la musique, «  je ne sais pas jouer d’un instrument, je n’y connais rien mais on a fait des maquettes avec le DJ Luc DS, c’est assez foutage de gueule mais j’aime beaucoup le résultat ». Rapidement le MySpace est créé, et l’homme à la fois ‘peopolisé’ dans les médias suite à son livre est suivi de très près par des maisons de disques. « Pour l’instant je n’ai rien signé, on verra bien... »

Celui qui oscille constamment entre notoriété et anonymat, revient à la réalisation. Il créé, l’été dernier, les frères Etienne, toujours avec son ami Eduardo. Il tourne sa propre version d’une scène mythique de Brigitte Bardot, dans Le Mépris, mais à sa sauce, version «  caillera  » comme il dit. «  C’est décalé, court et drôle, ça plaît beaucoup  !  ».

Et pour cause, la vidéo a déjà été vue par 140 000 internautes sur Dailymotion, hébergeur des créations de Vignale, toutes visibles dessus.

Depuis 2008, il est devenu directeur d’une collection people littéraire chez l’editeur Au bord de l’eau. Mais son gros projet, c’est la réalisation de son premier long-métrage. « Je vais tourner une suite de La Belle et la Bête, de Jean Cocteau, sauf que la belle a 60 ans ! » il manque encore une production suffisante pour achever son film. « Je refuse d’aller vers une boîte de production, je préfère rester libre quitte à avoir moins d’argent  ». Car, en effet, Frédéric Vignale n’a presque pas travaillé pour quelqu’un, «  j’essaye de vivre de mon art, de ma passion, je suis heureux comme ça  ! »

Ce papa de deux petites filles, comblé et confiant, assure que sa plus grande peur, « c’est de tomber dans l’indifférence, ça pourrait me tuer ». Une chose qui n’est pas prête d’arriver pour cet artiste multi-tout, dont l’aventure ne fait que commencer.

(1) Chez l’éditeur Id Livre
(2) En collaboration avec l’écrivain Damien Perez, L’Embarcadère édition
(3) Préfacé par Maître Gilbert Collard, aux éditions Le bord de l’eau