Interview d’Olivier Vial (UNI) résolument contre le bloquage des Universités

Interview d'Olivier Vial (UNI) résolument contre le bloquage des Universités

Le gouvernement a cru faire une bonne opération en faisant voter la loi sur l’autonomie des universités pendant les vacances, mais c’est raté.

Les syndicats étudiants qui s’y opposaient l’auraient-ils acceptée en raison d’un calendrier défavorable ? La contestation absente au mois de juillet, fait rebond en novembre, juste avant le mouvement social organisé par les syndicats la semaine prochaine… La grogne est-elle générale, ou bien les étudiants sont-ils manipulés ? Nous avons forcément tous en mémoire comment le gouvernement Villepin a perdu la face avec son fameux contrat première embauche, mais là, c’est bien la jeunesse qui a été l’aiguillon de la contestation.

Le MAGue a demandé à Olivier Vial, délégué général de l’UNI et fer de lance des anti-bloqueurs comment il voyait la suite des opérations.

Le MAGue : Comment et d’où est parti ce mouvement de contestation étudiante ?

Olivier Vial : Au départ, il s’agit de quelques dizaines d’étudiants, ceux-là mêmes qui ont par exemple été à l’origine du mouvement de protestation éphémère à Tolbiac au lendemain de l’élection présidentielle. Là, ils ont cherché à étendre les blocages à partir des facs où ils sont forts, à Tolbiac, Sorbonne-Paris IV, Toulouse-Le Mirail… C’est la stratégie du focisme imaginée par Ernesto Che Guevara. Il y a des éléments violents, agressifs, ils sont motivés et prêts à tout. Ils sont également à l’origine de pas mal de dégradations là où ils ont opéré.

Le MAGue : La loi sur l’autonomie des universités a été votée en juillet, à l’issue d’une table ronde avec tous les acteurs, s’agit-il de quelque chose de spontané ?

Olivier Vial : On a vu beaucoup de badges des syndicats Sud ou FSE, moins ceux de l’Unef et de la LCR… Ce sont bien sûr des étudiants très politisés, mais la bannière syndicale convient mieux à ce mouvement de protestation, qui doit venir en renfort de celui de la semaine prochaine. Une chose est sûre, c’est qu’il va durer jusqu’au 20 novembre, au moins.

Le MAGue : Le blocage des universités vous paraît donc tout à fait téléguidé ?

Olivier Vial : Là, ils veulent faire la grève pour faire la grève. C’est une volte-face politique très opportuniste de leur part, car il s’agit d’organiser un front commun le plus large possible pour renforcer le mouvement social. La loi sur l’Université a été votée en juillet, l’Unef s’est déclarée satisfaite des accords qui ont été passés avec le pouvoir… Il n’y a pas non plus lieu de revenir sur des dispositions comme le LMD par exemple, qui est en vigueur depuis 4 ans. C’est vraiment un mouvement artificiel et pavlovien.

Le MAGue : Vous êtes contre les blocages, avez-vous le soutien des pouvoirs publics ?

Olivier Vial : Nous avons rencontré la ministre jeudi, Valérie Pécresse a paru très déterminée à ne pas céder. Bien entendu, on sait bien qu’elle ne sera bientôt plus en première ligne et que tout dépendra de ce qui va se passer la semaine prochaine. Mais le Premier ministre a fait part à la radio le matin même de la même fermeté… Nous espérons que les présidents d’université feront face à leurs responsabilités en évacuant si nécessaire les lieux, pour que les cours puissent reprendre le plus rapidement possible. Symbole fort de l’évolution des mentalités : Nanterre n’est pas bloquée à l’heure actuelle !

Le MAGue : Avez-vous l’impression que la protestation est bien suivie chez les étudiants ?

Olivier Vial : La manifestation qui a été organisée à Paris jeudi a rassemblé 500 personnes, dont 80 journalistes ! Ceux qui organisent les blocages mobilisent leurs troupes les mardis et jeudis depuis 7 ans, de façon systématique, et c’est essentiellement pour cette raison qu’on en a entendu parler hier. En revanche, à notre initiative et même de façon spontanée se sont créés des collectifs anti-blocages : à Lille, à Lyon, à Tolbiac. Lorsque les établissements sont fermés, ils s’organisent sur FaceBook

Le MAGue : On a tout de suite en mémoire le mouvement de protestation contre le CPE, pas vous ?

Olivier Vial : Il n’y a rien de comparable avec ce qui s’est produit l’année dernière. Les étudiants, dans leur grande majorité, ont l’impression qu’on leur raconte des coups, et beaucoup ont déjà fait l’expérience des conséquences désastreuses des grèves et des blocages pour leurs études. Leur point de vue a évolué aussi : 61% des étudiants sont favorables à la sélection, 70% des bacheliers choisissent actuellement une filière sélective, et 42% persévèrent effectivement dans cette voie. L’intervention des forces de l’ordre n’est plus perçue comme une provocation, comme c’était le cas il y a vingt ans, et la plupart des étudiants sont excédés par les manœuvres d’agitateur professionnel d’un tout petit nombre. Il y a eu à Paris une AG qui s’est tenue pendant 6 heures en vue de l’adoption d’une motion favorable à la grève.

 

C’est reparti, le grand guignol de l’an dernier…
On le dirait, on nous le dit, doit-on l’admettre ?
La révolte a pris corps, mais qui en est le maître,
À toute action sociale, il faut un timonier !

Les étudiants sont mal, on ne peut pas le nier,
Pas en phase avec ce qu’ils se sont vus promettre
Ce n’est pas ce qui fait monter le thermomètre :
On sent bien chez certains un esprit rancunier…

Le mouvement de grève a-t-il autant de prise
Qu’un an plus tôt ? Il vient en rebond, par surprise
Pour renforcer à point nommé les syndicats.

Mais ce n’est pas sympa d’utiliser les jeunes
Dans un conflit parfait pour aggraver leur cas,
Quand on sait bien qu’au mieux plus longs seront leurs jeûnes !