C’est sur cet "effet Pygmalion" justement que, bien antérieurement à ce livre, en 1912, Bernard Shaw a imaginé et construit cette pièce pleine d’intelligence, de sens et d’humour, jouée en ce moment au Théâtre COMEDIA et intitulée sobrement "PYGMALION".
Sa pièce a inspiré le film aux 7 oscars de Georges Cukor, "My Fair Lady".
S’il n’y avait qu’une seule bonne raison de se rendre à une des représentations - mais il y en a des dizaines d’autres - ce serait pour voir l’extraordinaire composition de l’acteur et comédien Nicolas Vaude. Ce dernier marque littéralement "PYGMALION" de son timbre de voix si particulier, de sa dégaine unique, de son physique longiligne et de sa très belle maîtrise corporelle dans l’espace. Il ne joue pas le professeur Higgins, il le devient, il lui donne vie dans un numéro d’acteur impressionnant et un talent rare. Un rôle sur mesure pour le jeune homme qu’on a déjà vu dans d’autres rôles à costume au Cinéma, Théâtre et à la Télévision et qui est un des plus prometteurs de sa génération.
Nicolas Vaude s’approprie ce Pygmalion, en faisant un double, en mouvements impétueux, de lui-même, saisissant de vérité, d’énergie, impeccable dans le phrasé précis et sophistiqué du professeur Higgins, un éminent linguiste, célibataire, endurci et misogyne, adorateur de sa mère - interprétée par la magnifique Danièle LEBRUN - qui fait le pari fou de transformer en 6 mois une marchande de fleurs, Eliza Doolittle - Barbara Schultz - argotique, en une dame, une Lady de la meilleure société anglaise.
Dans des décors (trois tableaux très réussis comprenant la sortie d’un théâtre, l’appartement du professeur Hingis et l’hôtel particulier de la mère du professeur) de toute beauté crées par Jean-Marc STEHLE et grâce à la magie des costumes de Michel FRESNAY, les personnages jouent impeccablement leurs rôles autour de Nicolas Vaude. Nous retrouvons ainsi avec plaisir Henri Courseaux qui est formidable en professeur Pigrin, paternaliste, affectueux, respectueux et sensible faisant une parfaite opposition au personnage d’enfant gâté insupportable d’Higgins.
Barbara Schultz ne démérite pas à côté de tous ces grands comédiens, même si elle n’a pas encore le métier suffisant, elle donne une bonne énergie et offre une belle générosité à son personnage et mérite d’être vivement encouragée. Bien que très à l’aise dans la deuxième partie de la pièce où elle campe la demoiselle éduquée, elle manque parfois un peu de justesse dans le rôle de la souillonne des rues vendant ses fleurs, mais pas son corps... mais personne ne lui en voudra tant on sent que l’investissement pour ce rôle et son travail ont été optimum.
On ne peut que vous encourager à aller jusqu’au boulevard de Strasbourg et à son théâtre COMEDIA ; l’accueil y est charmant, la salle très bien agencée et le spectacle vaut vraiment le coup d’œil, une vraie jubilation drôle et enlevée, une distribution impeccable, un rythme d’enfer, une subtilité à chaque souffle et virgule, une mise en scène du meilleur effet.... Voilà une œuvre collective qui mérite d’être récompensée d’un Molière, au moins.
A voir ABSOLUMENT !!