Interview : Yvan Marc

Interview : Yvan Marc

« Des Chiens, Des Humains » est l’album qu’il faut avoir dans sa discothèque si l’on souhaite combler le vide entre la chanson française revendicatrice et la musique pop-rock made in camembert. Yvan Marc nous remet par ce CD tout au long de son premier opus produit par les Mickey 3D, des titres sortis de son tiroir et de son terroir, sur le pourquoi et le comment de notre société de consommation, sur la vie, les amours, les emmerdes au quotidien et donc par ce fait caresse nos chiens dans le sens du poil.

Que pense Mona (votre chienne) de l’album ?

Yvan Marc : « Mona a participé à la création de l’album, à priori elle a apprécié. Après je ne sais pas si elle comprend tout à mes chansons. Elle ne se met à hurler que lorsque l’accordéon vient sur mes chansons. Elle vient même s’installer dans ma caisse à guitare. »

Avant de sortir votre album solo, vous avez beaucoup tourné avec différents groupes dont les Mickey 3D, que vous a appris cette période de la vie ?

Yvan Marc : « J’ai joué dans pas mal de groupe mais j’ai toujours fait mes compos. Cela m’a surtout appris à jouer devant peu de monde, à gérer la scène et donc à me prendre des vestes. Cela m’a aussi permis de parler aux gens : quand on est dans un petit bar, le groupe joue mais ensuite il est indispensable de capter l’auditoire. Le problème de ces petits lieux vient du fait que les conditions sont difficiles et ne permettent pas de progresser musicalement. »

En quoi consistait votre spectacle de « La Cuisine » votre 1er album auto-produit ?

Yvan Marc : « C’est de là que j’ai commencé à avoir une autre approche de la musique. A la fois de l’album et de la scène. Il fallait travailler le détail. Peaufiner l’ambiance musicale et ce que je voulais amener sur scène. Déjà on jouait assis, avec la construction d’un décor, nous étions 4 musiciens, c’était beaucoup plus chanson que ce que je peux faire actuellement. Quelque chose de plus proche d’un théâtre que d’un concert, j’interpellais les gens, il y avait moins d’énergie. C’était beaucoup plus posé et calme. »

Pensez-vous que ce nouvel album « Des Chiens, Des Humains », vous auriez été capable de l’écrire à 20 ans ?

Yvan Marc : « Je ne pense pas. D’écrire les chansons peut être mais ensuite dans les arrangements et les interprétations il m’a fallu du temps. Ma voix aussi a évolué. »

Pour ce nouvel album vous avez du chercher d’autres collaborateurs musicaux ?

Yvan Marc : « Pour cet album j’ai beaucoup bossé avec Bruno Preynat qui est l’ingénieur son des Mickey 3D, il a apporté sa touche personnelle avec ce côté éléctro-machine. Je ne me sens pas vraiment musicien même si je joue du piano et de la guitare, je ne demande qu’à apprendre. Je n’ai pas assez d’expérience pour faire les arrangements tout seul. J’ai aussi demandé à mes musiciens avec qui je travaille depuis 1 an et demi de me venir en aide. »

Toutes vos chansons ont une « odeur » musicale particulière, « Agnès » n’a pas la même couleur que « Propaganda » ou « T’aimes pas la Ville » par exemple, est-ce que c’est le fait de composer à plusieurs qui donne cet éclectisme ?

Yvan Marc : « Beaucoup de gens me disent qu’il y a vraiment des ambiances différentes sur chaque titre. C’est ce que j’aime faire, ne pas rester dans un style identique. J’aime bien la variété. Confier des chansons à des personnes qui ont des influences diverses et variées cela donne vraiment un choix qui sonne bien au final. »

Par contre vos paroles sont beaucoup plus personnelles ?

Yvan Marc : « Je pars toujours d’une idée, d’une petite phrase. Ensuite j’essaye de trouver une mélodie, puis ensuite je peaufine mes paroles. J’avance pas à pas. Je commence toujours d’un bout de texte pour ensuite partir sur la musique. »

Avez-vous trouvé votre propre Ally Mc Beal ?

Yvan Marc : « Oui ! Bien sûr ! Cela fait un petit moment ! (rire) »

Y a t’il plus d’humanité dans les yeux de votre animal de compagnie que dans l’œil bovidé de JM Le Pen ?

Yvan Marc : « Ca c’est clair ! il n’y a pas de soucis ! »

Utiliser un animal pour dire ce que l’on pense cela évite que l’on vous astreigne une muselière ?

Yvan Marc : « Je vis à la campagne donc j’ai toujours été entouré de chiens. C’est vrai que de faire parler un animal me permet de donner un côté sympathique. Le chien c’est le meilleur ami de l’homme... je trouvais ça sympa d’expliquer ce lien. Des fois le comportement des humains est parfois un peu chien et le comportement des chiens peut s’avérer très humain. »

Peut-on dire d’Yvan Marc est un chanteur engagé masqué ?
Yvan Marc : « Oui si vous voulez ! »

Parler du racisme en utilisant le nougat c’est aussi une manière de rester pudique sur les sujets qui fâchent ?
Yvan Marc : « Ce que j’aime bien c’est de ne pas aller droit au but dans mes valeurs ou mes idées. J’essaye d’enrober sans jeter directement à la tête des gens ce que je pense. Laisser plusieurs lectures possibles. »

Pensez vous que les gens ne sont pas trop conditionnés par le premier degré pour comprendre votre vrai discours caché ?

Yvan Marc : « Oui, c’est vrai. Je pense que les gens ne prennent pas le temps de réfléchir ou tout du moins ont moins le temps de le faire. On est tellement abreuvé d’informations que l’on n’écoute pas tout. On est dans une époque du slogan avec des phrases choques. Je vais dire un lieu commun mais tout n’est pas blanc ou noir. On ne veut plus creuser et l’on se contente bien souvent de la première explication. »

La vie de couple aussi est souvent évoquée par la métaphore ?

Yvan Marc : « C’est dur de parler d’amour dans les chansons. C’est dur de parler du couple. Moi j’ai choisi de parler du couple dans les choses très quotidiennes. Dans les difficultés à gérer le quotidien avec des super moments et des moments plus difficiles dus à la vie de tous les jours. J’adore évoquer les compromis que l’on doit faire au jour le jour. »

Chaque trentenaire se reconnaîtra dans toutes vos chansons ?

Yvan Marc : « Oui ça touche des gens. Les trentenaires sont peut être plus concernés par mes chansons car ils s’y retrouvent. Il y en a qui n’aiment pas ma manière d’écrire mais la plupart sont touchés, sont sensibles à mon univers. C’est aussi marrant de voir comme une chanson peut avoir deux discours différents. »

Le gâteau de Savoie pour emballer les filles cela ne semble pas le meilleur choix selon « Léonard » dans l’un de vos titres, c’est pour cela que vous êtes devenu chanteur plutôt que cuisinier ?

Yvan Marc : « Le Gâteau de Savoie ne marche pas trop effectivement. En même temps j’adore bien la bonne bouffe. Je me sens plus à l’aise à faire des chansons qu’à me retrouver derrière un fourneau. »

Vous semblez aussi concerné par l’état de notre planète, la pollution des villes, êtes vous écolo dans l’âme ?

Yvan Marc : « Je suis très sensibilisé à ces problèmes là. Je suis inquiet. On malmène sacrement notre bonne vieille planète. J’ai un peu peur qu’elle arrive au bout du rouleau et que l’on n’arrive plus à faire demi-tour. Dans ma vie quotidienne j’essaye d’avoir un raisonnement de consommateur un peu moins primaire. J’avoue que ce n’est pas facile car la vie moderne oblige pour vivre à polluer. Je viens de commencer à écrire le prochain album et c’est vrai que je suis encore plus branché là dessus. »

Au point de vous présenter sur une liste politique verte ?

Yvan Marc : « Pas du tout ! je crois beaucoup plus en l’impact des associations, qu’elles soient écologistes, humanitaires ou sociales. Les asso’ sont impliquées dans la vie quotidienne des gens, beaucoup plus que les hommes politiques. Le tissu associatif français fait bouger le pays et interpelle les pouvoirs publics. »

Votre triptyque « Sur la Plage », « Les Maillots » et « La Mer » vous donne t’il des airs de chanteur balnéaire ?

Yvan Marc : « En fait au départ j’aime bien travailler sur des thématiques. A l’époque de « la Cuisine » je parlais souvent de bouffe et celui-là « Des chiens, des humains » je voulais l’appeler « Sur la Plage ». Je ne trouvais pas le titre accrocheur mais c’est pour ça qu’il y a beaucoup de chansons qui parlent de la plage. A la fois cela fait rêver car on a souvent envie d’aller au bord de la mer et c’est synonyme de vacances mais c’est aussi pour certains le rêve inaccessible ou difficile. Ce qui est frappant également c’est que l’on reproduit les mêmes comportements que lorsque l’on est chez soi ou au boulot. La mer c’est à la fois le côté nature et de l’autre la civilisation humaine qui dénature pour se l’approprier et en faire un terrain de jeu. »

Le naturel, les gens dits « normaux » vous les vengez d’une certaine manière de cette société où l’on doit être exceptionnellement beau, intelligent et socialement élevé pour exister ?

Yvan Marc : « C’est difficile à l’heure d’aujourd’hui d’y arriver, voir impossible, si l’on est pas parfait. Je pense que cela crée beaucoup de frustrations chez les gens et que l’on se rattache à des futilités. »

Vous avez dans vos chansons beaucoup de références à la télévision, êtes vous un télévore ?

Yvan Marc : « Je me suis un peu calmé, il y a des périodes où je pouvais regarder facile 5 à 6 heures par jour. J’adore les films, j’ai eu une période où je regardais beaucoup les séries (en particulier ‘Ally Mc Beal’) et les émissions de débat politique. La télé est un instrument qui compte beaucoup pour moi. Même si j’essaye d’avoir un regard critique. »

Si pour passer dans la petite lucarne vous êtes obligé de chanter en play-back, vous y allez ?

Yvan Marc : « Je pense que j’aurais du mal. Je sais qu’il y a des choses que j’ai pas envie de faire et que je ne ferais jamais. J’ai fais Taratata et la Musicale, ce sont deux émissions que j’aime bien et qui donne leur chance en live aux artistes. »

Vous êtes professeur en lycée agricole, qu’est-ce que disent vos élèves de votre deuxième casquette d’auteur-compositeur ?

Yvan Marc : « Là j’ai arrêté pour me consacrer à la musique mais bien sur qu’on en parlait, ils étaient contents car je partageais ma passion avec eux en leur faisant faire un projet pédagogique à partir de la musique. Je garde de très bons souvenirs de ce travail là. Tous les ans, avec mes étudiants j’allais enregistrer un CD. Ils composaient la musique et les paroles. A l’époque de mon premier album quand je suis parti en tournée j’ai emmené également certains de mes élèves. »

Etre signé chez « Moumkine Music » fondé par les Mickey 3D ça donne plus de possibilités d’être découvert ou alors ça met une pression difficile à gérer à cause de la comparaison ?

Yvan Marc : « Il y a les deux. A la fois c’est vrai que c’est bien car on bénéficie d’un parrain de qualité ensuite c’est vrai qu’il y a la comparaison. C’est plutôt flatteur d’être comparé aux 3D, après j’espère pouvoir exister par moi-même. »

Dernière question : voter blanc c’est voter con ?

Yvan Marc : « Voter blanc c’est déjà voter donc je ne peux pas affirmer ça. Rien que de se déplacer au bureau de vote c’est déjà pas mal. Longtemps j’ai cru que oui mais ces dernières années je ne sais plus. »

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